par Augustin Ménard | le 11 juin 2012 | revue Numéro 5 | thème Clinique
« Je voudrais trouver dans la forêt un arbre pour y tailler un bâton sur lequel je puisse m’appuyer ».
C’est une phrase, écrite sur un bout de papier, que Jacques me tend après l’avoir lue. Jacques est un sujet de trente-cinq ans que je rencontre une fois par semaine depuis quinze ans. Elle contraste avec les phrases habituelles qu’il me présente, interrompues, discordantes, dissociées, quand elles ne sont pas marquées d’ambivalence, mais toujours incohérentes, qu’il écrit sur un petit carnet qu’il a toujours avec lui, et qu’il lit dans les séances. Celle-ci se démarque nettement de toutes les autres. C’est une trouvaille, et il la considère comme telle. Cela s’entend dans la tonalité qu’il met dans sa lecture et se voit dans l’expression de satisfaction de son visage. Son importance est authentifiée par le fait que pour la première fois, il dépose chez moi un papier. Elle m’est donc adressée.
À partir de là, beaucoup de choses changent pour lui, dans son comportement comme dans ses propos, véritable tournant de la cure.