« Là bas, on est libres!* »

par Julien Lecubin | le 14 janvier 2013 | revue Numéro 9 | thème Clinique

*C’est ainsi qu’au niveau de la sortie 1 de l’autoroute E403, Yanis clame haut et fort avoir visité l’après-midi même avec son école cette terre de liberté qu’est la centrale de distribution d’une grande chaîne de magasins et ses kilomètres de rayons, son personnel accueillant, ses dégustations gratis ou ses innovations allant du revêtement de sol anti-griffes au distributeur de soda écologique.

Yanis a aujourd’hui 20 ans. Lors de l’entretien d'admission au Courtil en 2005, ses parents indiquent que leur fils ne s'intéresse pas aux autres ni à ce à quoi s'intéressent généralement les enfants de son âge. La mère note une dégradation de son état à l’entrée au collège, lorsqu’elle-même a commencé à souffrir d’une maladie maligne. Elle rappelle par ailleurs qu’ils ont failli mourir tous les deux lors de l’accouchement. Ainsi, isolé et persécuté, Yanis est réorienté vers divers établissements scolaires. Il décompense malgré un traitement neuroleptique et est finalement hospitalisé. Yanis est enfin admis en janvier 2006 au Courtil et scolarisé en section dite « magasin ». Dans le groupe comme à l'école, on observe bientôt que ce jeune se met régulièrement en position de victime. Chaque parole le vise et le soumet au caprice, il est alors lésé, privé, accusé.