Dr Denis Chaidron, psychiatre en défense sociale
Courtil en ligneS : Pour nos lecteurs étrangers, pouvez-vous expliquer le dispositif de défense sociale et votre fonction dans cette institution ?
Denis Chaidron : Il y a deux lois en Belgique qui traitent de l'enfermement des malades mentaux : l'une administrative de collocation1 – l'équivalent français des « soins psychiatriques sur décision du représentant de l’État » – et une autre loi – nommée loi de défense sociale – qui s'occupe de l'enfermement pénal des malades mentaux. Cette loi s'adresse – c'est comme cela qu'elle est rédigée – aux « anormaux et délinquants ». Quand un prévenu commet un délit et qu'un juge d'instruction est amené à travailler sur ce délit, il est en droit de demander une expertise mentale auprès d'un psychiatre afin de déterminer si le prévenu était « dément au moment du passage à l'acte ou atteint d'un trouble mental le rendant incapable du contrôle de ses actions ». C'est la seule loi qui a le mérite ou l'inconvénient de déterminer l'irresponsabilité d'un prévenu. Voilà pour la spécificité de la loi Belge, cela ne doit pas exister dans beaucoup d'autres pays. Enfin, il y a des jugements en France qui prennent encore, rarement peut-être2, le chemin de l'irresponsabilité. En Belgique, je ne connais pas le pourcentage mais c'est quand même quelque chose qui est assez répandu. Pour toute la Belgique, il y a à peu près 1000 patients internés en séjour carcéral qui ont donc un jugement rendu par une juridiction de jugement ou d'instruction. L'internement ne vient donc pas après un procès. L'interné a un avocat et est défendu mais cela ne se fait pas devant un tribunal ; ça c'est dans la procédure la plus classique.
1 Le mot « collocation » est un belgicisme hérité de l’ancienne procédure, en vigueur en Belgique jusqu’en juillet 1990. Il est synonyme d’« hospitalisation sans consentement ». Il a disparu des codes et des livres de droit pour faire place à l’expression « mise en observation ».
2 Cf. Portelli Serge, Récidivistes, Grasset, Paris, 2008, en particulier le chapitre « Maladie mentale, récidive et prison ».
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