21 / ART CRÉATION, LETTRE / janvier 2017

Gilbert et George : « Formes et contours »*

J’avais été interpellée*, il y a de nombreuses années, par la thématique du double et même de la gémellité qui me semblait traverser l’histoire de la photographie. Il n'y a qu’à penser à Lady Clementina Hawarden qui photographiait ses filles Clementina et Isabella, comme des répliques l’une de l’autre, sorte de mise en abyme dans la famille, les unes s’identifiant aux autres par de subtils jeux de miroirs ; Diane Arbus et ses portraits des jumelles Cathleen et Collen ; Kathryn Abbe et Frances Mc Laughlin-Gill, deux jumelles qui furent photographes chez Vogue, s’affichant comme des « jumelles photographes » et qui écrivirent des livres à propos de la gémellité mêlée à leur art : que ce soit Twins on twins ou Twin Lives in Photography, tout comme Reiko Nonaka, jumelle elle-même et qui fit de cette condition une thématique privilégiée de son œuvre : en photographiant des jumeaux côte à côte comme dans la série Double vie par exemple. Sans parler de Vibeke Tandberg qui dans la série Living together se créa un double, tantôt jumelle donc dans de banales photos de famille fictives, tantôt se recréant un corps à partir de l’image soit de son père soit de sa petite amie, les deux corps étant littéralement mêlés au sien par le truchement de la photographie. Et j’oublie certainement de nombreux artistes. C’est une thématique bien vaste, trop vaste à aborder ici...

J’ai donc choisi de me concentrer sur Gilbert et George qui me semblaient approcher ces différents rapports au miroir et dont les photographies se présentent comme d’étranges éclats de corps, selon notre thématique de l’année, mais également comme une œuvre d’autofiction, pour rejoindre celle de l’année passée. Car leur vie entière est une œuvre d’art, ambition de devenir des « Sculptures vivantes », l’un et l’autre ne faisant qu’Un, constamment dédoublés et présentés symétriquement dans de gigantesques photographies spéculaires. Si l’image rassemble ce que la pulsion morcelle du corps, comme l’avance Serge Cottet dans son texte d’introduction au Congrès de l’AMP1, je vous propose d’examiner d’un peu plus près l’œuvre de ces deux artistes qui nous enseignent, il me semble, sur ce que la pratique artistique peut venir border du corps.


* « Formes et contours » est une citation de Gilbert et George, issue de l’ouvrage : GILBERT & GEORGE, Conversation intime avec François Jonquet, Paris, Grasset, 2016, p. 59.

​L’image de l’œuvre Blood Head est issue de GILBERT & GEORGE, L'œuvre en images (1971-2005) en deux volumes, par la Tate Publishing 2007, Editions Gallimard pour l'édition française, 2007.
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