Numéro 9 / janvier 2013

"Histoire d'un secret" : savoir insu et émergence d'un regard

Mariana Otero, cinéaste, a réalisé en 2003, un documentaire « Histoire d'un secret »1 qui révèle un secret de famille, tu jusqu'à ses 29 ans. Elle apprit que sa mère, artiste peintre2, était décédée des suites d'un avortement clandestin en 1968, quand Mariana Otero avait 4 ans. Elle voulait se consacrer à sa carrière d'artiste.

L'entretien s'inscrit dans le fil du thème « L'enfant et le savoir ». Cet entretien met en lumière le savoir de l'enfant comme un « savoir authentique »3 qu'il soit su ou insu.

Les questions orientent l'interviewée à partir des premiers effets obtenus par la révélation du secret, pour nous entraîner petit à petit vers la substance inventive de l'objet regard. Variations sur le regard tantôt méchant tantôt bienveillant qui, au-delà de ces incarnations, est aussi un objet qui se décline de manière originale dans les activités infantiles, éclairant de façon troublante le sens du métier de cinéaste qu'a choisi Mariana Otero.

Le secret

Marie Brémond : Comment t'est venu le désir de faire ce film « Histoire d'un secret » ?

Mariana Otero : Tout a commencé quand mon père nous a dit comment ma mère était décédée. J'avais 29 ans.

Un jour, il nous appelle, ma soeur et moi, pour nous dire qu'il devait nous annoncer quelque chose d'important sur Clotilde, notre mère. Je ne savais pas du tout de quoi il voulait nous parler, Ma sœur peut-être un peu plus car elle avait parlé à mon père du fait que, depuis deux ou trois ans, elle tombait enceinte de façon un peu étrange et qu’elle avait dû faire des avortements un peu bizarres, des avortements à répétition : elle prenait la pilule mais elle tombait enceinte. Elle se demandait si Clotilde avait eu des histoires avec des avortements. Quand elle a posé cette question à mon père, il s'est dit qu'il devait nous dire la vérité. Un jour, il est donc venu à Paris. On est allés dans un restaurant en face de la Seine, un Couscous, j'avais commandé un tajine, je m'en rappelle très bien ! Mon père nous a dit le secret : « Votre mère n'est pas décédée d'une appendicite, elle est décédée des suites d'un avortement clandestin ». Il nous l'a dit comme ça, au moment où le tajine arrivait ! Je me suis exclamée : « Oh, c'est chaud ! ».

 

 


1 http://www.universcine.com/films/histoire-d-un-secret ou http://www.amazon.fr/Histoire-dun-secret-Jean-Jacques-Vautier/dp/B000639I54/ref=sr_1_3?ie=UTF8&m=A2F69PEIV6YYTG&qid=1357732312&s=generic&sr=1-3

2 http://www.amazon.fr/s/?ie=UTF8&keywords=clotilde+vautier&tag=googhydr0a8-21&index=aps&hvadid=9273955891&hvpos=1t1&hvexid=&hvnetw=g&hvrand

3Jacques-Alain Miller, « L'enfant et le savoir, conclusion de la journée de l'Institut de l'enfant 2011 » : les « enfants ne se trompent pas sur le caractère de semblant des savoirs qu’on leur impose et sur le halo d’ignorance dont ces savoirs sont entourés et où ceux-ci trouvent leur assise. Le savoir de l’enfant, au sens du savoir qu’il a, n’est pas de ces savoirs de semblant, de ces savoirs artificieux, qui sont montés en discours sur la même matrice que le discours de l’Université. Le savoir de l’enfant est un savoir authentique, qu’il soit su ou insu, et c’est à ce titre qu’il s’inscrit dans le discours analytique... c’est un savoir respecté dans sa connexion à la jouissance qui l’enveloppe, qui l’anime, et dont on peut même dire qu’elle se confond avec lui. »

 

 

 

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