26/ INTERPRÈTES DE L'INCLUSION / décembre 2021

Deuxième séquence : Accroche

Introduction 

Virginie Leblanc 

 

J’ai le plaisir d’animer la séquence qui suit dans laquelle Claire Tricaut, Catherine Favot et Cedric Lamarque vont présenter leurs textes, une séquence dont les élaborations cliniques sont extrêmement enseignantes et proposent une lecture forte de cette notion d’inclusion qui nous réunit aujourd’hui.

La table précédente a bien montré il me semble comment le couple inclusion/ségrégation fonctionnait de pair, ne serait-ce que parce que cette nouvelle manière d’envisager l’inclusion pour tous conduit droit à une politique de suppression de certaines filières d’enseignement spécialisé, par exemple, voire à une visée de désinstitutionnalisation dont l’idée ne cesse de se faire jour dans les directives globales en Europe.

Dans le travail de chacun des trois intervenants que vous allez entendre, on retrouve ce couple intégration/exclusion mais sous une autre forme pourrait-on dire, nouvelle paire qu’on pourrait nommer inclusion/extraction. 

En mathématiques, domaine qui a inspiré le terme (et inspiré Lacan), l’inclusion suppose une relation entre deux ensembles dont l’un inclut l’autre. Mais pour qu’il y ait véritablement inclusion, il faut que les deux ensembles soient égaux. Vous entendez comment cet idéal a guidé les développements qui mènent à la notion d’inclusion sociale, où l’élément inclus, certes n’est pas un ensemble mais loin de se faire à une norme commune, c’est la norme qui est censée se faire à lui, soit disparaître, avec cette visée de l’égalité.

Justement : il me semble que notre pratique de l’inclusion se place précisément à l’inverse de cette idée d’égalitarisme et pourtant dans une visée qui redonne toute sa dignité à la vie et au travail subjectif d’un enfant. C’est en quoi les trajets présentés par nos trois intervenants sont précieux : des trajets où l’inclusion de la singularité de chacun des enfants dans le groupe de vie ou de classe suppose une modification subjective chez l’enfant, ne va pas sans une cession, l’obligation de lâcher un bout de ce qui envahit le jeune et l’a mené à la prise en charge au Courtil ( Philippe Bouillot rappelait souvent que pour rentrer au Courtil, cette cession était nécessaire).

 

Vous entendrez dans ces textes toute une gamme, un champ lexical du trou, de la chute, de la perte, du battement, de la présence/absence...

 

Mais si perte il y a pour l’enfant, ça n’est pas sans perte pour l’intervenant également, qui lui aussi doit concéder à lâcher (son idéal, notamment thérapeutique, vous l’entendrez, ses idées préconçues, son espoir parfois, laissant ainsi la place aux inventions du résident et avec le résident). Et c’est justement ce tenant lieu d’extraction, de perte, de cession qui permet de susciter le transfert, en en modifiant du même coup notre conception (nous sommes là bien davantage du côté de la  présence des corps des intervenants qui mouillent leur chemise que du sujet supposé savoir)

De sorte que ce travail est extrêmement enseignant également en ce qu’une fois de plus la clinique vient asseoir nos présupposés théoriques, et les faire bouger : si chacun des deux, enfant et intervenant, lâche, pour autant, il ne s’agit pas dans cette rencontre véritablement de l’ordre de cette séparation que théorisa Lacan dont l’opération permet qu’un objet pulsionnel soit extrait, que le sujet va chercher dans l’Autre et dont il se pare. Les jeunes que nous rencontrons, cet objet, ils l’ont dans la poche, ce qui fait qu’ils sont si menacés à l’idée qu’on pourrait leur arracher. Comment penser alors et travailler l’inclusion sur ce fond de non séparation foncière entre le sujet et l’Autre ?

Comment saisir qu’une cession, une extraction est quand même possible, qui permet que quelque chose passe entre les jeunes et les intervenants, que quelque chose se noue ? Via tout un tas d’objets hétéroclites qui peuvent toutefois parfois permettre une certaine forme de circulation, que l’objet entre eux et l’autre permette qu’ils puissent moins se sentir, voire se faire, incarner cet objet de l’autre ?

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